TRAC ET MÉDITATION
AVANT-PROPOS Tout artiste, qu’il soit musicien, danseur, chanteur ou tout orateur connaît bien cette sensation désagréable que l’on appelle familièrement le trac. Cet article hors-série a été proposé par un lecteur. Si vous aussi souhaitez proposer un sujet, écrivez-moi en passant par ce formulaire. Je tiens à préciser que pour certaines personnes, le trac est un formidable stimulant. Une peur que l’on affronte peut devenir un puissant moteur. Mikhael Piccone, chanteur Lyrique témoigne : « pour moi le trac est nécessaire et bon. Avec l’expérience j’ai appris à le maîtriser pour utiliser son énergie […] Avant de monter sur scène, j’essaie de ne pas perdre de vue le fait que je veux avant tout m’amuser ! » Cependant, dans cet article, je me concentrerai sur le fait de ressentir le trac comme un handicap. Bonne lecture ! UNE ALERTE SUR NOTRE TABLEAU DE BORD… …Voilà ce qu’est le trac. C’est une indication que quelque chose de trop dangereux, de trop envahissant ou de trop chargé émotionnellement est entrain de nous arriver. Une montée de trac c’est une crise angoisse, par conséquent sa fonction est de nous protéger d’un danger et de nous pousser à fuir. C’est un allié formidable dans le cas où l’on se retrouverait nez-à-nez avec un lion, ou un assassin. Car pendant une crise d’angoisse notre rythme cardiaque accélère et donc augmente aussi la quantité de sang qui arrive à nos muscles, notre respiration s’amplifie pour apporter plus d’oxygène aux cellules de notre corps. Dans le même temps notre cerveau relâche de l’adrénaline, boostant nos capacités physiques et cérébrales ! Bref, une crise d’angoisse, c’est un « shoot » que le corps nous envoie pour nous donner les moyens de survivre. Le trac est donc à la base un allié bienveillant. Le problème est quand cela arrive dans des situations où il n’y a pas de danger réel. Car après avoir reçu ce « shoot », si nous restons sans rien faire à attendre un passage d’examen, une prise de parole ou le début d’un concert, il y a un décalage entre ce que nous ressentons et ce qui se déroule réellement devant nous. C’est ce moment de flottement qui est particulièrement désagréable et que tous les angoissés et anxieux connaissent par cœur. Le corps tremble sous l’effet de l’adrénaline et de la sur-oxygénation des muscles, le cœur bat très fort, ce qui augmente le sentiment de peur, et le cerveau tente par tous les moyens de nous convaincre qu’il faut prendre la fuite. Nous nous sentons défaillir, nous avons peur de tomber dans les pommes, voire de mourir. C’est la panique ! Dans le cas des artistes ou des orateurs, il n’y a pas de réelle situation de danger. Le trac étant une angoisse, on ne peut le définir comme une peur, il est par définition irrationnel. La peur est rationnelle car elle réagit à un danger physique réel et imminent. L’angoisse, c’est la « peur d’avoir peur ». C’est donc une appréhension, une anticipation. Un violoniste qui se prépare à jouer un solo appréhende de rater son air, d’être en échec, moqué et ridiculisé devant des milliers de personnes. Ce sont ces pensées anticipées qui vont lui faire ressentir un trac énorme. Et ce, qu’il soit en début ou en fin de carrière. La réalité est que dans l’immense majorité des cas, tout se finit très bien. Car ne l’oublions pas, pour se produire devant un large public, il faut avoir un niveau de maîtrise de son art très élevé. Les artistes et orateurs peuvent être comparés à des sportifs de haut niveau par le temps qu’ils passent à « s’entraîner », par les prouesses qu’ils peuvent accomplir, leur endurance, leur passion et leur motivation. Soulignons aussi que le trac s’arrête quasiment toujours au moment où l’orateur prend la parole, où le chanteur monte sur scène ou lorsque le musicien joue une première note. TRISTE RÉALITÉ Dans un documentaire diffusé sur une chaîne britannique, les journalistes évoquaient les trop régulières prises de médicaments ou d’alcool pour lutter contre le trac. La pratique serait même presque normale dans le monde de la musique classique. Avant d’aller plus loin, il faut tout de même souligner les conditions de vie d’un artiste. Souvent loin de chez lui, son travail lui demande un temps infini, il se retrouve régulièrement isolé dans une chambre d’hôtel loin des siens, il travaille tard le soir, les week-ends, se produit devant un large public, devant des caméras, des critiques, des gens haut placés dans la culture etc… ! Tout ce stress,il faut bien le contrôler ou l’évacuer d’une façon ou d’une autre. N’oublions pas que le public attend une « performance » ! Tom Eisner, violoniste, témoigne : « Pendant 20 ans, au lieu de jouer du violon, j’avais le sentiment d’être un débutant qui n’avait aucune capacité […] Quand je montais sur scène, j’avais l’impression de marcher vers ma mort. » The Guardian Pour retrouver une certaine sérénité dans sa carrière, il a du prendre des bêtabloquants. Rachael Lander, violoncelliste, a eu ses premières crises d’angoisse à 14 ans, voici ce qu’elle dit : » J’avais un sentiment incontrôlable de ne plus pouvoir avancer comme je le souhaitais, j’étais piégée […] Quand je buvais, ces attaques s’arrêtaient. J’ai aussi pris du Valium et des bêtabloquants. » Interview dans The Telegraph Alors évidemment, tous les musiciens et autres artistes ne boivent pas d’alcool ni ne prennent de médicaments avant leurs représentations, mais le phénomène est trop important pour ne pas être évoqué. LES 3 ASPECTS DU TRAC Comme nous l’avons vu dans la définition du trac, ce dernier est une fonction naturelle de notre système nerveux. Le problème vient donc du moment où il se déclenche et de l’impossibilité de fuir la situation. On peut définir trois aspects dans cette forme d’angoisse : Un aspect mental, un aspect émotionnel et finalement un aspect physique. Le mental est le siège de nos croyances et de nos pensées automatiques. C’est de lui que viennent des peurs « positives » comme le